Angelus · En attendant le printemps
mercredi, janvier 16, 2019
Je ne pouvais passer sous silence ces deux lectures faites en décembre dernier: un fabuleux recueil de nouvelles qui, pour faire changement des Amériques, se passe en Australie, et un mauvais roman dont je me serais bien passée.
La
découverte de Balistique, de D. W. Wilson, a été une révélation. La parution de
son recueil de nouvelles, La souplesse des os, et la rencontre de l’auteur au festival America, ont enfoncé le
clou. Je voue une admiration sans borne pour D. W. Wilson. Heureux hasard, je tombe sur ce bout d’entretien:
ANGELUS – TIM WINTON
La souplesse des os est une sorte de cousin d’Angélus, qui est un recueil de nouvelles
interconnectées situées sur la côte Ouest de l’Australie. Les personnages
principaux sont un flic et son fils – le père de Winton avait été policier.
C’était bizarre. Je me suis dit: « Oh, c’est comme ça qu’on peut
faire. »
Il n’en fallait pas plus pour que je me garoche les yeux fermés sur cet Angélus dont j’ignorais tout. Et là... nouvelle révélation! La parenté littéraire entre les deux auteurs est incontestable.
Les dix-sept
nouvelles du recueil sont ancrées à Angelus, une petite ville côtière fictive située en Australie occidentale. La finesse avec laquelle ces
nouvelles sont harmonieusement assorties frappe. Vic Lang traverse ce recueil, directement ou indirectement. La puissance de
ces nouvelles s’explique par leur densité et leur construction impeccable. Les
allers-retours entre le passé et le présent éclairent la vie des personnages,
créant un tout uniforme. Ce n’est pas la description d’événements dramatiques
qui intéresse Tim Winton, mais les répercussions qu’ils entraînent et la façon
dont ses personnages parviennent ou non à se sortir la tête hors de l’eau. «Commission», la nouvelle
qui m’a le plus bouleversée, met en scène Vic et sa mère mourante. Sur son lit
de mort, Carol demande à son fils de retrouver son père qu’il n’a pas vu depuis
plus de vingt ans. Tim Winton raconte des vies et leurs trajectoires avec la verve d’un conteur et la
précision d’un horloger. L’échec des
relations (familiales, conjugales), l’amour, la solitude, la mort, la soif de
liberté servent de toile de fond à ces nouvelles poignantes. Ces histoires de vie qui s’entrechoquent et se
complètent m’ont jetée à terre. Tim Winton, au même titre que D. W. Wilson, font partie de ces auteurs que je suivrai les yeux fermés.
Angelus, Tim Winton, trad. Nadine
Gassie, Rivages poche, 400 pages, 2009.
★★★★★
Un film a été réalisé à partir des nouvelles de Tim Winton. Me v’la bien curieuse d’y jeter un oeil.· · · · · · · · ·
EN ATTENDANT LE PRINTEMPS – ALEXANDRA FULLER
Les cousins Rick Overlooking Horse et You Choose Watson sont élevés par leur grand-mère dans la réserve de Pine Ridge, dans le Dakota du Sud,
jusqu’à ce qu’ils soient envoyés dans un pensionnat en Oklahoma. Le tempérament
des deux cousins ne pourrait pas être plus différent. L’un est taiseux et calme,
l’autre bavard et bouillonnant. Leur chemin se séparent quand Rick part au
Vietnam. Gravement brûlé, il rentre au bercail et part vivre
à l’écart de la réserve. Refusant sa pension militaire, il gagne son pain en
vendant des médicaments à base de plantes. Il se retrouve avec des jumeaux sur
les bras, les élèvera jusqu’à ce qu’ils volent de leurs propres ailes. You
Choose, lui, évite le service militaire. Il devient président tribal pendant
que l’American Indian Movement culmine. Il pige dans les fonds tribaux,
est pris la main dans le sac et est envoyé en prison où il passera plusieurs
années. À sa sortie de prison, il s’enfonce dans un puits sans fond.
La lecture
de ce roman m’a profondément agacée. Les chapitres sont brefs, souvent moins de
trois pages, chacun chapeauté d’un titre de circonstance. Ça, c’est plutôt bien. Le
ton est décalé et souvent empreint d’humour. Ça change. Par contre... le fil narratif étant presque invisible, j’ai eu
l’impression de lire une enfilade d’anecdotes. L’ensemble manque cruellement de
profondeur, les personnages
sont unidimensionnels et fortement stéréotypés. J’ai trouvé la fin forcée,
comme si l’auteure avait manqué de jus. Mais le pire, c’est l’impression que
j’ai eu que ce roman servait de prétexte pour faire passer
un message éculé: les méchants Blancs et les pauvres Amérindiens ne
pourront jamais s’entendre. Un peu plus de nuance aurait été bienvenue. Le fait
qu’aucune goutte de sang indien ne coule dans les
veines d’Alexandra Fuller n’aide pas la cause! Je vais dorénavant me méfier des
tipis sur les couvertures de livres.
En attendant le printemps, Alexandra
Fuller, trad. Anne Rabinovitch, Éditions des deux terres, 224 pages, 2018.
★★★★★
20 commentaires
J'adore la couverture du recueil "Angelus" ! Qu'est est belle !! et je le note parce que tu es super convaincante !!
RépondreSupprimerMaintenant, ne reste plus qu'à le trouver! J'ai eu un mal fou à mettre la main dessus...
Supprimerça ne m'étonne pas. C'est Cuné qui m'avait donné envie de lire ce livre il y a... bien une dizaine d'années déjà. Et moi aussi, sans non plus faire une traque de ouf, j'ai un mal fou à le trouver.
SupprimerUne dizaine d'années, quand même!
SupprimerC'est génial que de «vieux» livres, sans être des classiques, ressurgissent ici et là, de manière épisodique.
Bonne suite de recherche... car il en vaut vraiment la peine!
En lisant ton commentaire sur le Fuller je m'étonne de ta persévérance : moi quand un livre m'agace à ce point je ne le termine pas ! Mets-tu un point d'honneur à finir chaque livre même si tu n'accroches pas ? J'ai ce souci avec le nouveau Kate Atkinson que j'attendais comme le Messie : il me tombe des mains et j'en suis bien triste ... là, je me force à continuer mais tant d'autres lectures m'appellent ...
RépondreSupprimerJ'ai tendance à abandonner un livre assez rapidement (et sans aucune culpabilité). Si, une fois 50 pages lues, je ne suis pas accrochée, je ferme tout. C'est d'autant plus étonnant, ici, que je me sois rendue à la fin. La forme (courts chapitres) faisait que les pages se tournaient à une vitesse folle.
SupprimerC'est d'autant plus difficile d'abandonner un roman lorsqu'il est écrit par un(e) auteur(e) apprécié(e). Kate Atkinson... J'imagine ta déception! Stop ou encore?
Pour l'instant je persévère, je suis trop triste à l'idée d'abandonner ! J'en suis à 150 pages et si je m'ennuie un peu moins, je ne peux pas encore dire que j'aime ... pfff
SupprimerC'est bien quand ça se met à décoller un peu! 150... tu es persévérance. Au moins, tu auras la satisfaction de l'avoir lu en entier! Déjà, ce n'est pas rien.
SupprimerJe suis totalement emballé par le recueil de nouvelles dont je n'avais jamais entendu parler jusqu'alors.
RépondreSupprimerC'était une belle et bonne surprise. Assez pour que je veuille poursuivre rapidement ma découverte de cet auteur australien.
SupprimerJe te souhaite vivement de le rencontrer, toi aussi!
Je crois avoir lu deux romans de Winton il y a très longtemps, et qu'ils m'avaient bien plu. Je note le recueil, à découvrir à l'occasion du mois de la nouvelle !
RépondreSupprimerExcellente idée que la lecture de ce recueil pour «mai en nouvelles».
SupprimerJ'ai un de ses romans dans ma pal. J'ai vu qu'il en avait écrit plusieurs.
Tu ne te souviens aucunement de ceux que tu avais lus?
Je me souviens d'un qui s'appelle La femme égarée, et c'est celui qui m'a le plus marquée, un roman étrange, dont je n'ai pas tout compris, mais apprécié l'ambiance, entre oppression et surnaturel (enfin je crois !).. et en consultant Wikipédia, je me souviens que le second, c'est "Les ombres de l'hiver", mais je n'en ai gardé aucun souvenir. Ceci dit, comme il me semble que c'est celui que j'ai lu en premier, il avait dû me plaire suffisamment pour que je relise l'auteur...
SupprimerTu imagines bien que je suis partie faire une petite recherche! Au final, j'ai réussi à trouver "La femme égarée", que j'ai commandé aussitôt, ainsi qu'un autre recueil de nouvelles.
SupprimerÀ suivre!
forcément, j'ai tout de suite été voir pour me procurer l'Angelus ! sinon, oui, je me méfie aussi des tipis sur les couvertures (même si c'est tentant!)
RépondreSupprimerest-ce que les romans qui remportent le Prix du Gouverneur au Canada sont tous traduits (soit vers le français, soit vers l'anglais) car il faut que celui que je viens de finir de lire le soit !!! or je ne trouve rien ...
Vivement la découverte de Tim Winton. Je comprends pourquoi Wilson l'apprécie tant...
SupprimerIl faut que je lise le roman que tu viens de terminer. Les romans qui remportent le Prix du Gouverneur sont généralement traduits. Mais il y en a qui tombent dans une craque... J'espère que ça ne sera pas le cas de celui dont nous parlons. Il me fait trop envie!
Toujours preneuse de conseils de lecture quand il s'agit de recueils de nouvelles ! j'en ai découverts de bien beaux grâce à Electra et toi !
RépondreSupprimerQuand c'est bon, c'est vraiment bon. Mais c'est assez rare!
SupprimerTu es courageuse de terminer les livres plombants... j'en suis incapable!
RépondreSupprimerJe voulais voir jusqu'à quel point elle allait tirer le bouchon! J'ai tendance à abandonner bien avant... Alors, pour le courage, c'est exceptionnel!
SupprimerPar ailleurs, j'ai pensé à toi en lisant "Ouvrir son coeur". Ce roman est totalement dans tes cordes.