Difficile de savoir réellement pourquoi, mais en France (j’ajouterais au Québec aussi), les nouvelles ont tendance à avoir mauvaise réputation. On les dit invendables, ou bien elles apparaissent comme une version édulcorée du roman. Du coup, peu d’auteurs français en écrivent, et seules quelques maisons d’édition en publient, surtout des recueils d’auteurs étrangers. Pourtant, la nouvelle est loin d’être un genre mineur, et sa lecture peut être tout aussi gratifiante que celle d’une grande fresque romanesque. Si la forme courte privilégie un autre rapport au texte, à l’intrigue et aux personnages, de par sa brièveté elle apporte en retour une intensité, une richesse et une diversité qui sont de véritables atouts. On la dirait faite pour le monde moderne, où chacun se plaint du manque de temps pour faire ceci ou cela, et le plus souvent pour lire. Une nouvelle, c’est vingt à trente minutes de lecture, un objet parfait tant sur la forme que sur le fond. Si on ose risquer à une comparaison culinaire, le recueil de nouvelles est en quelque sorte une dégustation au cours de laquelle on goûtera une dizaine de mets différents au lieu de passer tout un repas sur le même plat. Les plaisirs sont différents, et tout aussi uniques et irremplaçables. Dans leur diversité, les nouvelles permettent de multiplier les points de vue.
Cet extrait de la préface de 20 + 1 short stories est signé Francis Geffard. Doté d’un flair hors du commun, Francis Geffard a la littérature nord-américaine tatouée sur le cœur. En plus de diriger la collection «Terres d’Amérique» chez Albin Michel, il est le fondateur du Festival America.
Pour fêter les vingt ans d’existence de la collection, il a eu la brillante idée de réunir en un seul recueil les plus grandes voix de la littérature contemporaine nord-américaine. De Sherman Alexie à Louise Erdrich, en passant par Brady Udall, Joseph Boyden, Holly Goddard Jones, Richard Lange et Michael Christie, pour ne nommer que ceux-là. Sans oublier un petit nouveau: Callan Wink, dont le premier recueil est en cours de traduction et paraîtra en septembre 2017. Très prometteur…
Des 21 nouvelles, je n’en avais lu que deux: «Les enfants de Dieu» d’Eric Puchner, fabuleuse nouvelle tirée de La musique des autres et «L’homme-lézard» tirée du recueil Le paradis des animaux de David James Poissant. Pour le reste, ce fut des découvertes et plusieurs coups de cœurs (14 coups de cœur sur 21, c’est ce que j’appelle une excellente moyenne). Au fil du recueil, c’est l’Amérique dans toute sa richesse et sa profondeur qui se dévoile. Par le détour de la fiction, ces bribes d’Amérique en révèlent plus sur la société que n’importe quel article de journal, autant de moments qui font écho à notre propre vie et l’enrichissent. Chacune de ces nouvelles présente des destins en accéléré vus par le bout de la lorgnette. Ce que je retiens par-dessus tout, c’est l’humanité qui s’en dégage, l’immense tendresse envers ces destins cabossés et la compassion pour ces perdants magnifiques. Le recueil se termine sur une présentation des auteurs et des traducteurs.
Alors, est-ce qu’il vaut la peine, ce recueil? Définitivement, oui. Même les fines bouches seront rassasiées!
20 + 1 short stories, Collectif, « Terres d’Amérique », Albin Michel, 2016, 660 p.
© unsplash | Robert Zunikoff
J'ai assisté à la présentation de ce recueil par l'éditeur au festival de saint Malo, et même si je sais que c'est un connaisseur en littérature américaine et un passionné, cela ne m'a pas convaincue, un côté \»coup de pub\», j'ai trouvé. Je ne connais que deux des recueils, celui de Udall et celui de Boyden, tout les deux excellents ! Bonnes découvertes …
C'est vrai, les français ne sont pas fans de nouvelles, et j'avoue me trouver dans le lot. Peut-être n'ai tout simplement pas encore lu le bon recueil.
Je pensais ne pas aimer les nouvelles (je crois que je n'avais pas vraiment la \»culture\» nouvelles…) mais récemment je me suis surprise à lire de plus en plus de recueils, et à y prendre du plaisir.Du 14/21 c'est excellent! je note donc ce recueil, qui j'en suis sûre me plaira, la double référence Terres d'Amérique (j'adore cette collection!) et Festival America me parle bien 🙂
Hâte de finir ma lecture commencée chez toi ! J'étais heureuse de le trouver dans le tas à mon arrivée ! Bon, moi pas besoin de me convaincre.. depuis JD Salinger, je place les nouvelles en haut de mon Panthéon personnel ! En voyant ta liste de recueils, je me dis : ah j'ai lu les trois derniers ! et j'ai plusieurs (encore une arrivée hier midi du facteur) ! bref, quand je te disais qu'il faut qu'on en fasse quelque chose !
J'aime bien lire des nouvelles, je trouve que ça change les idées rapidement (et comme ça, on peut en lire plusieurs à la fois ! ). Je note donc le titre de ce livre ! 🙂
J'en ai l'eau à la bouche !!
Oui, le coup de pub est indéniable. Il a voulu marquer les 20 ans de la collection. Je trouve l'idée de réunir 21 auteurs nord-américains dans un même recueil excellente. Je dois découvrir Udall bientôt. La nouvelle lue m'a marquée. Les nouvelles de Boyden… Comme j'adore ses romans, le recueil devrait assurément beaucoup me plaire.
C'est exactement ça! Pas encore lu LE bon. Je n'étais pas fan non plus jusqu'à la lecture de quelques recueils marquants, dont un de Banks et celui de Ron Rash. Depuis, je lis un recueil par-ci par-là et je ne pourrais plus m'en passer!
Les nouvelles, c'est comme le vin, ça s'apprivoise! Tu ne peux que te régaler avec ce \»20+1\».
Oui, je sais, tu es vendue aux nouvelles. Et je le suis aussi, maintenant!J'ai finalement mis la main sur \»Franny et Zooey\». Ravie d'avoir les trois bouquins sous la main. Je m'y mets très bientôt. Tu as lu les trois derniers de ma liste?! Tu as donc DÉJÀ lu celui de Christie? Si oui, je rage… Tu vas trop vite. Tu fais ta Léa, là!Oui, décidément, il faut qu'on fasse quelque chose avec les nouvelles. Cogitons…
La diversité des auteurs permet de faire un vaste tour d'horizon et de pénétrer dans plusieurs univers différents. Un régal!
Fonce, Noukette. Tu ne peux que te régaler!