Volé · Annette Lapointe
mardi, janvier 17, 2017
Le roman d’Annette Lapointe, le premier traduit en français, m’intéressait parce qu’il se déroule dans une
contrée lointaine (eh oui) dont j’ignore à peu près tout: la Saskatchewan, l'une des dix provinces canadiennes, et sa plus grande ville, Saskatoon.
Trois mille
pieds au-dessus du niveau de la mer, la ville est si plate qu’on peut s’asseoir
sur son perron et regarder son chien se sauver pendant trois jours. À une
demi-journée d’Edmonton, à une journée complète de Calgary, à une journée et
demi de Winnipeg. À deux jours de la ville américaine la plus proche, qui est
d’après lui dans le Montana ou le Dakota-du-Nord. Il faudrait être désespéré
pour se rendre là-bas.
Rowan Friesen a vingt-six ans. Il vit seul dans la
maison de son oncle, dans un petit patelin près de Saskatoon. Il vole. Pour
gagner sa vie. De l’électronique, des décorations pour chevaux, des robes de
pow-wow (les trucs d’Indiens, ça se revend bien et cher). Le tout vendu sur
Ebay. Il trafique un peu de drogue aussi, même si lui ne touche plus au crystal
meth depuis longtemps. Il s’est fait prendre pour ses mauvais coups, a payé
pour : «Quatre arrestations, deux condamnations, cinq ans de sa vie, déjà,
reclus dans diverses prisons de l’Ouest canadien.» Mais ça ne l’empêche pas de
continuer. Parce que ça paie bien.
Entre la recherche d'un butin à voler, un cadavre à enterrer et les détours en institut psychiatrique pour visiter son copain Macon, Rowan poursuit sa route remplie de crevasses et de nids-de-poule.
Entre la recherche d'un butin à voler, un cadavre à enterrer et les détours en institut psychiatrique pour visiter son copain Macon, Rowan poursuit sa route remplie de crevasses et de nids-de-poule.
Roman du désoeuvrement et de la vie qui va. Le portrait social est sombre, mais combien réel. Il s'en passe des belles dans cette région semi-rurale. De l'inceste, un meurtre, de la drogue, de la petite criminalité, du sexe cru.
Présent et passé s’entremêlent au fil des
chapitres. Le passé de Rowan éclairant son présent. Sa vie défile et recule. Il est brinquebalé par sa mère, connaît la vie de cow-boy auprès de
son grand-père et de son oncle, se lie d'amitié et découvre l'amour auprès d'un ado fucké. S'ennuie, beaucoup. La maladie mentale (psychose,
schizophrénie) occupe une place importante entre ces pages. Du père de
Rowan qui chantait avec les chevaux jusqu'à ce qu'il leur crève les yeux parce qu'ils n'arrêtaient pas de chanter. De Macon, son meilleur ami et premier amant, interné.
Et on voyage à travers ces pages! Des coins paumés des Prairies canadiennes jusqu'à Detroit, pour aboutir en Alaska. Le paysage est grandiose, désolé et désolant.
Et on voyage à travers ces pages! Des coins paumés des Prairies canadiennes jusqu'à Detroit, pour aboutir en Alaska. Le paysage est grandiose, désolé et désolant.
Je m’attendais à l’histoire désespérante d’une jeunesse égocentrique et désabusée, le genre qui me tape sur les nerfs pour cause de trop grande complaisance. Je découvre une histoire de vie cabossée sans pathos ni atermoiement. Vibrante de vérité. J'ai bien quelques petits bémols, mais trop insignifiants pour être notés.
Dès qu’un nouvel auteur du Canada anglais est traduit, je
suis curieuse. Mes incursions dans la littérature de la Saskatchewan
n’ont pas été transcendantes jusqu’à maintenant. Déçue par Cool Water de Dianne Warren, assez charmée par Etta et Otto (et Russell et James) d’Emma Hooper, dans lequel la
Saskatchewan était effleurée, j’attendais l'ébranlement. Ce roman me réconcilie! Volé frappe fort et secoue.
Maintenant, j'espère juste que les autres romans d'Annette Lapointe seront traduits. Sans quoi, je devrai apprendre l'anglais pour les lire. Parce que cette auteure, je veux à tout prix la suivre.
Maintenant, j'espère juste que les autres romans d'Annette Lapointe seront traduits. Sans quoi, je devrai apprendre l'anglais pour les lire. Parce que cette auteure, je veux à tout prix la suivre.
Volé, Annette Lapointe, trad. Michel Vézina, XYZ, 350 pages, 2016.
★★★★★
13 commentaires
De l'inceste, un meurtre, de la drogue, de la petite criminalité, du sexe cru.... Je me demande à qui ça peut intéresser...
RépondreSupprimerÉtonnant, mais avec un nom comme ça, j'ai senti de suite l'auteure canadienne, mais surpris de l'anglais. Mais où va-t-on si avec un nom bien québécois on écrit en anglais...
Pour revenir, à ma première remarque, il a l'ait bien ton bouquin, inceste, drogue et sexe cru, oui je crois que ça peut m'intéresser :D
Je doute que ça puisse t'intéresser!
SupprimerAvec son nom, j'étais persuadée qu'elle était francophone du Québec ou de pas loin. Eh ben non! Sûrement ses descendants!
Pour revenir à ma première phrase, je me rétracte, je suis persuadée que ça t'intéresserait. mais... bonne chance pour le trouver!
oh il me tente vraiment ! je veux le lire, j'ai vu la couverture sur IG mais j'ignorais tout du sujet , il est fait pour moi ;-) (en anglais ou français) mais l'édition francophone est superbe!
RépondreSupprimerOui, il est pour toi, celui-là.
SupprimerTu pourrais le trouver en anglais. Sinon, je te l'apporte cet été!
Un peu dans la même veine que Yaak Valley, Montana ou rien à voir? Parce que ta phrase "Roman du désoeuvrement et de la vie qui va. Le portrait social est sombre, mais combien réel" me fait penser au même genre.
RépondreSupprimerMaintenant que tu m'y fais penser, il y a un peu de ça. Ni pour le style ni pour le lieu (et sans longueurs!), mais pour l'ambiance générale, oui! Du bon, très bon...
SupprimerAvec ton billet, je me rends compte que je n'ai jamais jeté un seul coup d'oeil à la littérature Canadienne/Québécoise. Ce roman me fait terriblement envie, là, rien qu'en lisant ton avis. Je me laisserai bien tenter. Merci pour la découverte !
RépondreSupprimerDe rien! Mais dis-moi, comment se fait-il que tu n'aies jamais goûté à la littérature québécoise/canadienne?
SupprimerCe roman est certes une bonne plongée dans la littérature canadienne, mais demeure assez près de la littérature américaine. Il y a plus dépaysant!
Moi, c'est le cas pour la littérature japonaise. Mais j'ai tout de même tenté quelques romans!
Il a l'air très dur ! Pas certaine qu'il est pour moi mais je voudrais bien découvrir cette littérature canadienne hors-Québec aussi.
RépondreSupprimerAssez dur, oui, mais j'ai vu tellement pire. Et puis, le personnage de Rowan est fascinant. Assez antipathique au départ, puis le dévoilement de son passé nous permet de comprendre son présent.
SupprimerJe viens de terminer "Écorchée" de Sara Tilley, publié chez Marchand de feuilles. Auteure terre-neuvienne. Son roman navigue entre Terre-Neuve et les Territoires du Nord-Ouest. C'était lonnnggggggg. Billet à venir!
Coup de cœur pour moi! Le genre de livre que j'ai envie d'avoir... ÇA c'est VRAIMENT mon genre de livre. C'est noir, mais pas tant. Et Rowan est attachant même si on ne le dirait pas comme ça.
RépondreSupprimerJe pense me l'acheter!
Ah là là, ça me fait tellement plaisir. Je note le VRAIMENT!
SupprimerCe roman est passé trop inaperçu. Je compte bien le relire!
J'espère tellement que d'autres romans d'Annette Lapointe seront traduits...
Je l'espère aussi! J'arrête pas de penser à ce livre, au personnage. La traduction est impeccable. Effectivement il est passé bien trop inaperçu!
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