Reflets en eau trouble · Joyce Carol Oates
dimanche, février 05, 2017
Est-ce que je vais mourir? –
comme ça?
Oui, Kelly, tu vas mourir. Et ta mort sera atroce.
Si Kelly Kelleher avait eu la moindre idée de ce qui l’attendait en montant dans la Toyota du Sénateur...
Dans la maison de vacances des St John, sur l'île de Grayling, au large de la côte du Maine, la journée du 4 juillet s’annonce festive. Parmi les gens présents, Kelly et sa bonne amie Buffy, chez qui a lieu la fête. L’arrivée du Sénateur attire l'attention. Il se pavane, bavarde, boit et flirte avec la jolie et naïve Kelly. C’est décidé, ils s’esquiveront en douce, attraperont le ferry et iront passer la nuit au motel pour une joyeuse partie de jambes en l'air.
Le Sénateur, complètement saoul, est pressé. Il ne veut surtout pas manquer le ferry. Sur la route, la voiture zigzague, manque un virage, dérape et tombe à l’eau. Le Sénateur parvient à s’en extraire. Kelly, non. Elle reste seule, avec une des chaussures du Sénateur qui flotte près d'elle.
Kelly ne perd pas espoir. Le Sénateur va venir la secourir, c’est certain. Il est juste aller chercher du secours. Mais non… Kelly restera prisonnière, cloîtrée à l’intérieur de la voiture. Seule, avec les images de sa vie qui défilent, et cette eau qui ne cesse de monter...
Oui, Kelly, tu vas mourir. Et ta mort sera atroce.
Si Kelly Kelleher avait eu la moindre idée de ce qui l’attendait en montant dans la Toyota du Sénateur...
Dans la maison de vacances des St John, sur l'île de Grayling, au large de la côte du Maine, la journée du 4 juillet s’annonce festive. Parmi les gens présents, Kelly et sa bonne amie Buffy, chez qui a lieu la fête. L’arrivée du Sénateur attire l'attention. Il se pavane, bavarde, boit et flirte avec la jolie et naïve Kelly. C’est décidé, ils s’esquiveront en douce, attraperont le ferry et iront passer la nuit au motel pour une joyeuse partie de jambes en l'air.
Le Sénateur, complètement saoul, est pressé. Il ne veut surtout pas manquer le ferry. Sur la route, la voiture zigzague, manque un virage, dérape et tombe à l’eau. Le Sénateur parvient à s’en extraire. Kelly, non. Elle reste seule, avec une des chaussures du Sénateur qui flotte près d'elle.
Kelly ne perd pas espoir. Le Sénateur va venir la secourir, c’est certain. Il est juste aller chercher du secours. Mais non… Kelly restera prisonnière, cloîtrée à l’intérieur de la voiture. Seule, avec les images de sa vie qui défilent, et cette eau qui ne cesse de monter...
Redoutable Joyce Carol Oates! Elle est venue jouer, avec ce court roman (ou longue nouvelle?), dans le terreau de mes pires terreurs.
Dans la
nuit du 18 juillet 1969, à Chappaquiddick Island, au Massachusetts, Ted
Kennedy et Mary Jo Kopechne s’éclipsent après une fête bien arrosée. Kennedy perd le contrôle. Le véhicule plonge dans l’eau. Il parvint, de peine et de misère, à s’en extraire. Il prend aussitôt la fuite, laissant la jeune femme à
son sort tragique. Il n’a
signalé l’accident à la police que le lendemain matin, après avoir consulté un avocat de la famille.
Joyce Carol Oates s’empare de ce fait divers pour le
mettre à sa main. Son angle d’approche est
effroyablement efficace. Dès le début, la voiture tombe à l’eau. La lente agonie de Kelly suit. En
choisissant de se concentrer sur les derniers instants de vie de la jeune femme, elle
crée un climat d’oppression insoutenable. Le passé de Kelly, qui s'immisce dans le récit, permet quelques instants de répit, le temps de reprendre son souffle.
Si les personnages principaux n’échappent pas à certains
clichés, cela ne m'a pas du tout agacée. Kelly, cette jeune femme naïve qui vénère le Sénateur, qui se voit bien jouer un
rôle dans sa campagne présidentielle, comptant bien gagner son amour. Et ce cher Sénateur… La cinquantaine bronzée, concentré sur son nombril surdimensionné, ambitieux, obsédé par le pouvoir et le désir de sauver sa peau à
n’importe quel prix.
Joyce Carol Oates distille l'horreur et la lâcheté avec son talent implacable. Le style est nerveux, les phrases acérées donnent au récit un rythme oppressant et haletant jusqu’au final. Un roman tout en tension, que j’ai lu d’un seul élan, le souffle court.
Reflets en eaux trouble, Joyce Carol Oates, Babel, 160 pages, 2001.
Joyce Carol Oates distille l'horreur et la lâcheté avec son talent implacable. Le style est nerveux, les phrases acérées donnent au récit un rythme oppressant et haletant jusqu’au final. Un roman tout en tension, que j’ai lu d’un seul élan, le souffle court.
Reflets en eaux trouble, Joyce Carol Oates, Babel, 160 pages, 2001.
★★★★★
29 commentaires
Mais c'est horrible! Et en même temps, je devine le plaisir de lecture que cela doit procurer, toute cette tension. Cela me tente beaucoup, merci. :-)
RépondreSupprimerOui, c'est totalement horrible. Oates a le don de créer le malaise! Parmi sa production gargantuesque, voilà un de ses bons romans.
SupprimerTon excellent billet m'a ''replonger'' (sans jeu de mots crois-moi), dans un très beau souvenir de lecture malgré la dureté de la teneur de ce roman. Même qu'il est possible que je le relise un de ces jours. Merci Marie-Claude pour tes chroniques livresques toujours plaisantes à lire.
RépondreSupprimerT'es fine, Suzanne! Son angle d'attaque est immersif! Oates est l'une des seules auteures que j'aime lire précisément pour l'inconfort que ses romans entrainent. Avec elle, nous sommes à l'antipode du réconfortant!
SupprimerEt je t'approuve à 100%.
SupprimerN.B. Lire replongée et non replonger dans mon commentaire plus haut. ;-)
Dieu ce que cette auteure est attirante ! J'ai deux de ses livres dans ma PAL et tu viens encore de me donner l'envie d'aller les chercher.
RépondreSupprimerLesquels as-tu dans ta PAL?
SupprimerZombi et Marya
SupprimerJe connais "Zombi", mais pas "Marya". Je viens de lire le résumé, et voilà que ma curiosité est piqué!
SupprimerC'est aussi une de mes pires craintes... (j'ai même du mal à regarder des reportages qui se passent sous la mer, genre dans les abysses.. ça me fiche la trouille!)
RépondreSupprimerSoit! :-)
Elle risque de m'angoisser plus qu'autre chose cette lecture...
Bon ben, on n'ira jamais faire un tour de sous-marin ensemble, ni faire de plongée! Pour l'angoisse, oui! Ce roman frappe fort...
SupprimerC'est bizarre, enfin je connais le fait divers avec Ted Kennedy et j'ai acheté le roman de Oates mais le titre était juste Hudson River. Pas la même édition.. bref, je n'ai pas lu ton billet car je veux le garder - ça sera mon premier Oates donc ça se fête !
RépondreSupprimerOh! Tu commenceras pas un petit, et un très bon. Oui, et re-oui, ça se fête!
SupprimerEt cette eau froide qui monte qui monte qui monte...
RépondreSupprimerTerrifiant mais presque envoûtant... A se servir un verre de whisky on the rocks, pendant que l'eau noire monte monte monte...
Juste ces mots: monte, monte, j'en ai la chair de poule.
SupprimerIl faut que je me change les idées, je vais étouffer!
je n'avais jamais entendu parler de ce livre ! (il faut dire que notre amie JC Oates est prolifique!)
RépondreSupprimer160 pages, en plus, ça donne vraiment envie de découvrir ce roman !
Prolifique, tu dis?! Une machine à écrire, cette femme.
SupprimerSes plus petits romans m'ont souvent déçue, mais celui-là, ouf! Il vaut vraiment la peine. Je me répète, mais elle est redoutable!
Mon premier essai avec Oates était raté ("Sacrifice") mais je retenterai ! J'avais pensé à "Carthage" mais pourquoi pas celui-là ?
RépondreSupprimerQuel dommage pour "Sacrifice". Une première mauvaise rencontre. Je n'ai pas encore lu "Carthage", mais ce sera mon prochain Oates.
SupprimerPour récidiver, je te conseille un petit Oates. Et celui-ci est particulièrement bien approprié, je trouve, pour un deuxième rendez-vous!
Je le note; une lecture qui viendra enrichir ma malette pour mes ateliers nouvelles noires.
RépondreSupprimerUne bonne idée, ça! Très très noire, et une construction narrative très originale...
SupprimerArgh, toujours pas lu cette auteure! Et pourtant, ce n'est pas l'envie qui me manque, mais le temps, comme toujours...
RépondreSupprimerIl y a de bons gros pavés dans sa production gargantuesque, mais il y a aussi de petites plaquettes délicieuses (et très éprouvantes), comme celle-ci. Ça vaut le coup d'y goûter!
SupprimerLe croiras-tu, Marie-Claude, je n'ai jamais lu Oates ! Mais elle a l'air tellement terrifiante, s'emparant toujours de sujets effroyables ! Aurais-je un jour le courage de l'affronter ? Je l'ignore...
RépondreSupprimerJe peux le croire, même si je suis un tantinet étonnée! Pour être terrifiante, elle l'est! Elle a le don de déterrer le malaise là où il se terre. Je te rassure, certains romans sont moins éprouvants que d'autres. Je pense, entre autres, à "Petite soeur, mon amour", ou encore à "Marya, une vie", très inspirée de sa propre vie.
SupprimerJe n'ai pas lu celui-ci. Je viens de recevoir son dernier roman, sans l'avoir demandé parce que je me lasse un peu, elle publie vraiment beaucoup.
RépondreSupprimerBeaucoup, tu dis? Un à deux romans par année depuis des décennies... C'est énorme! D'où le fait qu'il y a du moins bons. Heureusement, les derniers romans lus sont très très bons. Je comprends qu'on puisse avoir envie de faire une pause!
SupprimerJ'adore cette romancière, ce roman sera donc à un moment ou un autre dans ma PAL ;-)
RépondreSupprimerMoi aussi, j'aime beaucoup JCO, quoique certains romans m'ont laissé de marbre. Mais devant une production aussi gargantuesque, le contraire aurait été étonnant. Celui-ci, toutefois, m'a complètement envoûtée.
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