Une jolie couverture toute simple chapeautée d’une citation de John Green. De toute évidence, il n’en fallait pas plus pour attiser l’engouement des jeunes lectrices. Eleanor & Park a reçu un accueil dithyrambique aux États-Unis. La blogosphère jeune adulte s’est enflammée, le bouche à oreille a fait le reste. Surfant sur la vague des histoires d’amour entre personnages atypiques à la John Green, Eleanor & Park a tout pour charmer.
1986, Omaha, Nebraska. Dans un bus scolaire, un garçon regarde une fille. Ne restant plus de places libres, il autorise la fille à s’asseoir près de lui, sans enthousiasme. Cette fille, il l’a trouve «grosse et gauche. Avec des cheveux hallucinants, rouges et bouclés. Et elle était habillée comme… comme si elle voulait qu’on la remarque». Silence. Malaise. Mépris réciproque. Les jours défilent. L’habitude s’installe, la curiosité s’éveille, le garçon et la fille se rapprochent. L’amour des comic books et de la musique les unissent, même si au départ, tout les sépare. Eleanor est grosse. Elle a les cheveux roux frisés, est couverte de taches de rousseur. Elle est étrangement attriquée, du genre à porter des cravates au cou et au poignet. Si elle s’habille de la sorte, si elle customise le plus possible ses vêtements, c’est pour camoufler sa pauvreté. Pauvre au point de ne pas avoir de brosse à dents et de devoir se brosser les dents avec du sel! Elle vit entassée avec sa mère soumise, son horrible beau-père et ses frères et sœurs.
Park est mi-Américain, mi-Coréen. C’est un garçon solitaire, intelligent et sensible. Il lit des comic books et adore la musique. Sentimental en diable, il assume sans honte l’amour fou qu’il éprouve petit à petit pour Eleanor. Park ferait tout pour Eleanor, et il en fera beaucoup…
L’histoire se déroule au milieu des années 80. Donc, pas d’Internet, pas de textos, pas de cellulaires, pas de iPad, non, juste des walkmans et des cassettes! L’amour naissant entre ces deux ados atypiques est rudement bien amené, tout en finesse. On est loin du conte de fée. C’est de l’amour vrai, sans conditions, démesuré. Les aller-retour entre le point de vue d’Eleanor et celui de Park contribuent pour beaucoup à l’intérêt du roman. Autour de l’histoire d’amour, il y est question de familles brisées, de beau-père qui boit et qui cogne, de pauvreté, d’intimidation. La traduction est assez boiteuse merci, sans compter les nombreuses coquilles, mais apparemment, ça ne gêne personne sauf moi!
Il est TRÈS rafraichissant de lire une histoire dans laquelle:
- la fille n’a pas un physique à faire tourner toutes les têtes et s’en accommode très bien, s’acceptant telle qu’elle est;
- le gars le plus populaire de l’école ne tombe pas amoureux de la fille la moins populaire. Park est un garçon tout ce qu’il y a de plus ordinaire (sauf pour Eleanor!);
- le garçon fait fi de la pression sociale qui impose de sortir avec une fille canon.
Ne serait-ce que pour ces raisons, Eleanor & Park est à lire.
Eleanor & Park, Rainbow Rowell, trad. Juliette Paquereau, Pocket Jeunesse, 2014, 378 p.