Un roman italien d’une auteure que je ne connais pas. Un premier roman. Une couverture en noir et blanc sans charme particulier. Une quatrième de couverture déjà lue mille fois. En somme, rien qui ne fasse spécialement envie. Et pourtant… J’ai quitté ce roman à regret, je ne voulais plus le lâcher, non parce que l’intrigue est si scotchante, ni parce que c’est plein de rebondissements. Non. Juste parce que je me suis attachée aux personnages, que j’aurais aimé les suivre encore et encore. Me laisser bercer par l’écriture et les images qu’elle fait naître.
Généralement, il faut une dizaine de pages pour mettre en place une atmosphère. Ici, dès le premier paragraphe, j’ai été prise dans les filets du texte:
Cica n’entre pas dans la mer avec les autres. Elle a les yeux mi-clos à cause du soleil perpendiculaire qui blanchit la plage marronnasse parsemée de mégots. Elle aussi à l’air d’un mégot, plantée dans le sable, accroupie comme si elle était en train de faire pipi. Sur son dos, elle a deux marques en demi-lune, longue chacune d’une main, juste en dessous de ses omoplates pointues. C’est pour ça qu’on la surnommée Cica, à cause de ses deux cicatrices…

Pour faire court, disons que ça raconte le destin croisé de deux enfants abîmés par la vie, chacun à leur façon. Je n’ai pas envie d’en dire plus, d’entrer dans les détails. Sinon que ça se passe en Italie, qu’en plus de Cica et Walker, plusieurs personnages secondaires sont extrêmement attachants, comme Carmelina, la voisine, ou encore Tomba, le chien de Cica.
Maria Paola Colombo écrit divinement bien, son écriture est envoûtante, ses phrases sont imagées, ses mots sont d’une justesse implacable. La traduction de Nathalie Castagne rend bien toute la substance, toutes la richesse du texte. Peu de romans me font cet effet, mais celui-là en est un. De ces romans à la fin duquel je me dis que peu importe ce que je lirai après, ce sera beige. À lire avec modération, pour faire durer le plaisir.
Brusquement, elle se sent heureuse, vraiment. Sans ombres. Ce matin elle s’est levée du lit les yeux gonflés par les pleurs, ce soir elle dormira dans le ville de la Reine. Voyez comme c’est. Il ne faut rien prévoir. Les choses peuvent changer en un instant. Et qui sait quoi d’autre, qu’elle ne peut encore imaginer.
Entre deux silences, Maria Paola Colombo, trad. Nathalie Castagné, Presses de la cité, 2014, 400 p.
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