
Été 1985. Tout va pour le mieux dans la famille Ziller. Warren et Camille vivent un bonheur paisible avec leurs trois enfants et leur vieux chien sénile. Jusqu’à ce que Warren achète un terrain dans le désert californien pour y construire des condominiums, persuadé de réaliser l’affaire de sa vie. Cette petite famille modèle quitte donc le Wisconsin pour un lotissement pour riches au bord du Pacifique. Si le projet est prometteur, il tourne vite au désastre, se révélant un véritable fiasco.Warren s’aperçoit que des déchets industriels déversés à proximité ont pollué son projet. Warren est ruiné. Toutes ses économies y ont passés. Chut, c’est un secret! Personne ne doit le savoir, surtout pas ses proches. Warren s’escrime à cacher sa faillite, même lorsque les huissiers débarquent dans sa luxueuse villa.
C’était prévisible, inévitable: le secret sera éventé, le château de cartes familial se met à vaciller et tout se met à dégringoler. La peur du lendemain, les mensonges, les aveux, les doutes qui assaillent l’épouse modèle contrainte de tenir à bout de bras une famille aux abois, avec trois enfants assez encombrants. Et quels enfants! Dustin, l’aîné, passe son dernier été à la maison avant d’entrer à l’université. Il rêve d’être une punk star et regarde d’un drôle d’oeil sa petite amie Kira qui aime nager dans des mares remplies de produits chimiques. Lyle, la rousse, est une ado rebelle, mal dans sa peau.Intello, elle passe tout son temps le nez dans les livres, déteste le soleil de la Californie qui la fait ressembler à un homard. Et il y a Jonas, l’extraterrestre de la fratrie, aux idées un peu morbides, dont celle de s’habiller tout en orange. Après la chute, cette famille modèle saura-t-elle retrouver son aura de perfection?
Eric Puchner signe un premier roman détonant, très maîtrisé, grinçant, explosif, sans concession.Sur le ton de la tragi-comédie, il désintègre les clichés de la famille idéale et de la société de consommation. Dans la première partie du roman, il dégomme le rêve américain pour ensuite approfondir certains aspects des personnages dans la deuxième partie, les faisant évoluer dans une toute autre direction.
Un roman magistralement orchestré, redoutable. Un de ces romans qui donnent à mieux comprendre la condition humaine, le fonctionnement de l’humain, seul, en famille et en société. J’ai été scotché tout du long, avalant les pages d’une seule traite. J’ai retrouvé le même enthousiasme que j’ai eu à la lecture des Corrections de Jonathan Franzen ou lors du visionnement d’American Beauty de Sam Mendes.
Famille modèle, Eric Puchner, Albin Michel, 2011, 544 p.