Originaire de Lituanie, Agnes porte en elle la mémoire familiale des pogroms et de l’extermination des Juifs. Quand la petite histoire s’entremêle à la grande… La grande Histoire commence au cours de l’été 1941, quand la moitié des habitants d’une petite ville lituanienne, sont massacrés dans une forêt. L’un des arrière-grands-pères d’Agnes est assassiné par l’autre. L’un, Juif, a connu les ghettos, les pogroms et l’extermination. L’autre était du côté des bourreaux.
Elle avait sur les bras Adolf Hitler et tous ses sbires, sans parler des quelque deux mille habitants de Jurbarkas, les deux cent mille Juifs lituaniens, les dix millions de Juifs d’Europe, les dix-sept millions de victimes du génocide et les quatre-vingts millions de morts de la guerre en l’espace de six ans.
Agnes rédige une thèse sur les mouvements d’extrême droite contemporains. Ses travaux de recherche l’amènent à rencontrer Arnor, un néonazi cultivé, orateur au charisme fascinant. La jeune femme vacille, complètement séduite par la force et la logique de ses idées. Le triangle amoureux se met en place. Agnes tombe enceinte. Qui est le père? Omar? Arnor? Omar est foudroyé par la trahison d’Agnès. Sa réaction est aussi violente que le dégoût qu’il éprouve. Il met le feu à leur maison, roule jusqu’à Keflavík et quitte l’Islande. Il se traîne à travers l’Europe, avec pour étapes des lieux dédiés à la mémoire de l’Holocauste. Au-delà de la douleur causée par la trahison d’Agnes, il ne peut admettre que son amant soit un néonazi. Sa quête le conduit dans la ville natale d’Agnes, où la population juive a quasiment disparu. Impossible d’en dire plus!
Le roman de Norddahl est extrêmement ambitieux, atypique, souvent déconcertant. L’originalité de son récit est d’entremêler une histoire d’amour contemporaine avec des passages sur la Deuxième Guerre mondiale, l’Holocauste, la crise économique actuelle, la montée de l’extrême droite contemporaine, le tout saupoudré d’une bonne couche d’humour. Attention, il faut s’accrocher, et fort, pour ne pas se perdre. Il faut persévérer. Norddahl apostrophe l’Histoire, questionne, bouscule, choque, heurte, secoue. Il dévoile des pans de la vie de chacun des personnages, télescope les voix et les points de vue, martyrise la chronologie. Le résultat est vertigineux. L’histoire est dense, poignante. Heureusement, l’ironie dont use Norddahl rend les pires situations souvent comiques. Illska propose une expérience de lecture à la fois passionnante et déroutante. Une chose est certaine: ce roman ne laissera personne indifférent. C’est garanti!
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