Qui n’a pas déjà rêvé de tirer quelqu’un dans la face avec un fusil de chasse? Peu importe les raisons. Elles sont toutes bonnes, sur le coup. C’est quand elles demeurent bonnes longtemps que j’agis. Chaque jour, je regarde une meurtrière dans les yeux. Elle est là, de l’autre côté du miroir (qui est aussi mon côté, mais vu à l’envers). Je suis une meurtrière. Ce visage est le mien. Mon visage est celui d’une meurtrière. Voilà.

Toute une entrée en matière! Dérangeante. Fracassante. La narratrice du premier roman de J.D. Kurtness n’a pas la langue dans sa poche. À douze ans, elle commet un meurtre accidentel et… y prend drôlement goût. Elle a trouvé sa vocation. Adulte, elle devient une traductrice «à cinq cennes» pour faire bonne figure, et une tueuse en série à ses heures perdues. Une justicière. Elle fait le grand ménage de ceux qui irritent son quotidien: pollueur, chauffard impatient, violeur, tapageurs nocturnes. C’est avec une minutie calculée, un souci excessif du détail qu’elle prépare ses méfaits. Tout en vivant normalement, en apparence, le cours de ses jours. Ses parents, ses colocataires ne se douteront de rien. Entre fumettes et constatations acerbes sur le monde, elle demeure aux aguets. Julie Kurtness ne nous convie pas à un thriller ou à un polar, mais bien à un roman psychologique dans lequel on se surprend à se lier d’empathie, à comprendre le grand «nettoyage» auquel s’adonne sa narratrice. Si la prémisse semble a priori noire et décadente, l’ironie et les sourires en coin sont surtout de la partie, ce qui rend l’histoire d’autant plus crédible et intrigante.
Alors là, quelle bonne surprise! L’originalité du premier roman de J. D. Kurtness doit beaucoup à la personnalité de son héroïne hors norme. Malgré la dureté du sujet, il flotte une brise de légèreté entre ces pages. C’est souvent loufoque, drôle, très drôle même. L’écriture est enlevée et directe. Une tension se fait sentir tout au long du roman, menaçante et féroce. Une seule réserve: la fin. Beaucoup trop précipitée à mon goût, voire expéditive. Un premier roman grinçant et corrosif. Un récit de vengeance à couper le souffle, comme seuls la folie et la haine savent en fomenter.
De vengeance, J. D. Kurtness, L’instant même, 2017, 132 p.
© unsplash | Sebastiaan Stam
CA a l'air pas mal, effectivement, pour un premier roman pure laine…
Tu as des invités ? Ce \ »grand ménage\ » ne me tente guère en fait … Le mélange de meurtres en série et d'humour, je crains le hiatus.
Tsé, un livre qui commence par \ »Qui n'a pas déjà rêvé de tirer quelqu'un dans la face avec un fusil de chasse?\ » je ne peux pas ne pas noter! Bon ça me donne l'air d'une psychopathe mais ça me fait rire. C'est percutant et j'aime bien les livres percutants. La couverture est belle, l'écriture a l'air bien. Hâte de le lire celui-là!
Tout cela m'intrigue bien, dis. Je me le note, au cas où je le croiserais, ce bouquin :)belle journée Madame Couette
Pure laine, certes. Et fichûment bien tourné. Donnée non négligeable, l'auteure est innue.
L'expérience est pour le moins déstabilisante. C'est justement cette façon de sortir des sentiers battus qui m'a plu. Sauf la fin!
Ben justement, il se trouve dans le petit colis!
Il est tout petit, se lit rapidement et on en ressort complètement décoiffé. Un très bon premier roman (sauf la fin précipitée).
Je suis plus que gâtée! 😀
un bon point, je ne connaissais pas les Innus…