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La beauté des jours · Claudie Gallay

Il y a des livres qui vous cueillent sans prévenir. Les mots de Meellaa avaient titillé ma curiosité.

Lire Claudie Gallay nécessite de la patience. Non seulement elle ne publie pas souvent, mais l’atmosphère de ses textes, d’une douceur enveloppante, donne au lecteur l’impression de ralentir le rythme du temps. 

Ralentir le rythme du temps. C’est ce dont j’avais besoin.

La vie de Jeanne était bien rangée. C’était presque une vie immobile, elle pensait que c’était presque pour cette raison qu’elle aimait tant regarder passer les trains.

Jeanne menait une vie calme, heureuse et régulière. Les matins et les soirs. Les jours. Il n’y avait pas beaucoup de différences.

Puis il y a Marina Abramovic adulée par Jeanne. L’artiste-performeuse serbe qui repousse constamment les limites de son corps, la peur, la fatigue, la douleur, dans une quête de transformation émotionnelle et spirituelle. Jeanne écrit à Marina, souvent, sans jamais avoir de réponse. Enveloppée dans son quotidien, Jeanne se démène pour que son âme ne rétrécisse pas et que sa douceur de vivre ne s’éteigne pas.

J’ai aimé la quotidienneté de ce roman: les dîners en famille, le transat dans la cour, le macaron du mardi, la rénovation de la cuisine, les jasettes avec l’amie. J’ai aimé cette femme à l’intériorité enflammée. J’ai aimé son ouverture, sa curiosité, son questionnement, son envie de mettre de la couleur dans ses jours. Pas de grands fracas ni de grands bouleversements, ici. Seulement la routine bien huilée, les choses de l’habitude et quelques bourrasques qui bousculent la quiétude de la vie. Jeanne m’a séduite, son entourage aussi (le mari, les jumelles parties du nid, la M’mé, les parents, la nièce, l’amie Suzanne, le collègue de la poste). Le style concis, épuré à l’extrême, est en parfaite adéquation avec la simplicité de l’histoire. Si la lecture t’amène à t’évader de ton quotidien, passe ton chemin. Jeanne et sa vie beige t’énerveront. Si, en revanche, la lecture t’amène à côtoyer des vies qui pourraient ressembler à la tienne, des vies que tu pourrais frôler, la vie de Jeanne devrait t’intéresser.

Elle se sentait enfin en équilibre, comme lorsque, en de rares occasions, ce que l’on est parvient à rejoindre ce que l’on croit être, et se noue à ce que l’ont fait.

À force de vouloir ressembler aux autres, on disparaît dans le paysage.

Maintenant que la glace est brisée, mon engouement pour les mots de Claudie Gallay est épidermique. À moi, pour très bientôt, Une part du ciel, Les déferlantes et Avant l’été.

La beauté des jours, Claudie Gallay, Babel · Actes Sud, 2019, 416 p.

Rating: 4 out of 5.

© Marina Abramovic | The Lovers

21 comments

  1. te voilà donc séduite ! encore une autrice à découvrir ! ça t’en fait pas mal 🙂 je m’habitue à ton nouveau blog ! je le regarde sur mon iMac !

  2. J’ai adoré ce roman de Claudie Gallay comme je te l’ai déjà dit quelque part. Après sa lecture j’ai regardé un documentaire sur Marina Abramovic, elle me fascine… J’ai découvert cette auteure avec Les déferlantes qui m’avaient totalement emportée… Ton avis me ravit !
    Tu vois, je suis toujours là… bon, pas sur mon blog, mais sur le tien, j’y passe un peu…

    1. N’empêche que tu me manques CHEZ TOI! Tu y reviens bientôt? Je ne mets pas de pression, là. Il faut avoir envie d’y revenir, d’abord. Et faut bien t’installer, aussi.

      Je lis encore un Claudie Gallay! Tu vois, je suis conquise. Mais ce n’est pas Les déferlantes, qui est pourtant dans ma PAL. En fait, je l’y ai redéposé. Après une cinquantaine de pages, quelque chose m’agaçait. Non pas les déferlantes (ça, j’adore. J’aime quand la nature se déchaîne, mais sans faire trop trop de fracas). Non, c’est l’espèce de nostalgie sous-jacente et l’impression que les personnages traînaient leur passé comme un précieux boulet. Je préfère toujours quand on regarde en avant!

      Vu mon engouement, je compte passer à travers l’oeuvre de Claudie Gallay. Je me garderai Les déferlantes pour la fin!

      1. Non, je ne reviens pas tout de suite, je suis en plein gros travaux, et il parait que j’ai une rentrée scolaire à préparer… Mais je te lis…

  3. De Claudie Gallay, j’ai lu il y a plusieurs années Les déferlantes et je n’avais pas été particulièrement emballée. J’aimerais bien lui laisser une autre chance.

    1. Tout le monde semble avoir lu Les déferlantes. Il y a ceux qui ont adoré, et les autres, comme toi. Ton non particulièrement emballée est dû à? L’histoire? Le style minimaliste?

      Pour ma part, je l’ai reposé après une cinquantaine de pages. Mais je compte y revenir plus tard. Parce que j’aimerais tout lire d’elle. C’est à ce point-là!

  4. Je n’ai lu de Claudie Gallay que Les déferlantes, mais j’étais tombée totalement sous son charme, j’avais adoré. Je note celui-ci, et je suivrai tes retours sur les autres titres qui ont rejoint ta pal !

    1. Encore Les déferlantes! Décidément, toutes mes copines de blogue semblent l’avoir lu.
      J’ai tenté le coup et je l’ai reposé après une cinquantaine de pages. Comme je l’écrivais à Krol, l’aura de nostalgie m’insupportait. Sans parler de cette impression que les personnages traînaient leur passé comme un boulet.
      Mais à cause de l’atmosphère (ah, ces déferlantes…) et pour les autres personnages que je n’ai pas encore rencontrés et dont je suis curieuse, j’y reviendrai!

    2. Ah, la nostalgie, oui, je comprends. Je l’ai lu il y a 5 ou 6 ans et peut-être à l’époque étais-je réceptive à la nostalgie, du coup. C’est vrai qu’à l’heure actuelle ça me saoulerait aussi, je crois. A creuser 🙂

  5. Ravie que tu aimes comme moi Claudie Gallay : Je recommande Les déferlantes (lu deux fois) Seule à Venise dans lequel j’ai retrouvé le charme de la ville et La beauté des jours beaucoup aimé également. Toujours des romans comme tu le dis où il n’y a jamais d’événements, de bouleversements mais plutôt des sensations, des états d’âme…. Et je trouve qu’elle sait très bien parler des ambiances…. 🙂

    1. J’adore! Si tu lis mes réponses aux commentaires, tu verras que j’ai eu un petit soucis avec ma tentative de lecture des Déferlantes. Reste que j’y reviendrai.
      J’arrive à la moitié de Une part de ciel. J’y suis à mon aise et je déguste. Tu as raison, c’est une formidable créatrice d’atmosphère.
      J’ai dévoré les premiers romans de Duras précisément pour cette même raison. J’avais adoré Le marin de Gibraltar et Les petits chevaux de Tarquinia. J’ai tout oublié des histoires, mais les atmosphères me reviennent juste à regarder la tranche de ces romans!

  6. J’ai du mal avec cette auteure.. j’ai lu «Dans l’or du temps» puis «Les déferlantes», dont les intrigues pourtant m’intéressaient beaucoup, mais quelque chose ne passe pas avec l’écriture, elle ne m’investit pas…

    1. Et moi qui croyait que tout le monde avait lu Les déferlantes. Il est dans ta PAL, donc je n’étais pas si loin de ma croyance!

  7. En lisant les commentaires, je vois que Les déferlantes divisent. Je fais partie de celles qui se sont beaucoup ennuyées en lisant ce roman. C’est le problème quand on découvre un auteur avec un ouvrage qui ne nous emballe pas : on n’a pas envie de le relire.

    1. Tu as raison, c’est un problème, cette non envie d’y retourner. J’ai eu des premières rencontres qui ne se sont pas bien passées. Aucune envie de remettre ça. Je pense, notamment, à Cécile Coulon.
      Par contre, quand j’apprécie, je remets ça vite! Je suis plongée dans mon deuxième Claudie Gallay. J’ai tenté, puis reposé Les déferlantes. Le pourquoi dans mes réponses aux commentaires. Ton ennui pour ce titre est dû au style, à l’histoire ou…?

  8. Comme quoi il suffit souvent de peu de mots pour faire effet! Merci à toi! Sans ton billet, j’aurais continué à lever le nez sur ces romans. J’avais une fausse impression de ses écrits. Honte à moi!
    Je suis plongée dans un autre de ses romans et… je m’y sens très bien!
    Merci encore!

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