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L’été au parc Belmont · Thara Charland 

Le portrait d’un père. C’est ce que la narratrice d’un Été au parc Belmont a voulu raconter. Un portrait de sa jeunesse à Cartierville, dans le nord-ouest de Montréal, à deux pas du célèbre – et disparu – parc Belmont; de sa vie d’homme et de père, dans une banlieue beige. Jusqu’à sa mort sur le balcon du chalet familial.

Au chalet, personne n’a pris soin de jeter le matériel médical que les ambulanciers ont laissé derrière. Les voisins sont rentrés chez eux, ont béni le ciel que la tragédie soit arrivée à d’autres, ont croqué leur blé d’Inde enduit de beurre, ont regardé le coucher de soleil, comme à leurs habitudes. Huit mois plus tard, lorsque nous reviendrons au chalet, nous verrons tout de suite la seringue abandonnée qui a passé l’hiver sur la galerie. Je chercherai le sang, mais ne le trouverai pas. La neige l’aura effacé.

Le livre de Thara Charland se construit par morceaux, comme un château de cartes, une mosaïque constituée de souvenirs, entrecoupés de plans dessinés à la main et de photos tirées de l’album familial.

Nous dormons tous les deux et un détail me surprend. L’ouvrage sur la table à café. Nous n’avons jamais eu de livres à la maison, les bibliothèques étaient pour les bibelots et les verres à vin. Je dis que nous n’avions aucun livre, mais ce n’est pas tout à fait exact. Maman et toi récupériez ceux que l’on recevait gratuitement avec les magazines que vous vendiez au dépanneur. Nous avons accumulé de cette manière, une semaine à la fois, la collection complète des romans d’Agatha Christie. Nous n’avons lu que Le crime de l’Orient-Express.

Thara Charland fait revivre ce père en quelques pages éloquentes, juxtaposant ses souvenirs de petite fille, d’adolescente et de femme, faisant s’enjamber la première et la deuxième personne. Les scènes défilent, se succèdent, pêle-mêle dans le temps. Une écharde dans mon emballement: certains passages portent sur les visites de la narratrice chez son psychanalyste. Je n’ai trouvé aucun intérêt à ces passages. D’autant plus qu’il n’est ni question du contenu de cette psychanalyse ni de son pourquoi, mais uniquement du lien entre le psychanalyste et sa patiente, lien empreint de froideur, de jaugeage et de frustration. Une petite écharde, donc. Les mots touchent au plus près du vécu. Le récit se dévoile à fleur de peau et c’est infiniment beau.

L’été au parc Belmont, Thara Charland, La Mèche, 2022, 216 p.

Rating: 4 out of 5.

© archives de la ville de Montréal

10 comments

    1. Je suis ravie qu’un sp de cette belle maison te soit parvenu. Tu vas passer un très bon moment de lecture, j’en suis persuadée. Hâte de voir si nous nous rejoindrons sur le petit bémol

    1. Oui, une bien belle lecture. Ça faisait longtemps que je n’avais pas été à ce point touché par un récit québécois contemporain.

  1. Ça pourrait certainement m’intéresser. J’ai juste une petite question : est-ce que le récit ne renvoie pas trop à des références typiquement québécoises ? SI c’est le cas, j’ai peur que ça me laisse un peu sur le bas-côté…

    1. Je pense qu’il a tout pour te plaire. Quant à ta question, si tu arrives à bien t’y retrouver chez Michel Tremblay, tu ne seras pas perdu du tout avec cet Été au parc Belmont.

  2. Vous me coûtez cher…Je viens de le télécharger sur ma liseuse:merci de cette belle suggestion!Ma tante et ma grand-mère nous amenaient mon cousin et moi au Parc Belmont,que de souvenirs…J’ai encore l’odeur du métal brûlé de la maison hantée…

    1. Ah! Tout le plaisir est pour moi J’aurais tellement aimé avoir l’âge pour aller m’y promener. Idem pour le parc Dominion. Le seul souvenir qu’il me reste, c’est la baleine du parc des Merveilles, situé dans le parc Lafontaine

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