J’ai repéré L’été où maman a eu les yeux verts chez Ingannmic. Je l’ai lu il y a déjà quelques semaines. Depuis, je cogite. Comment parler de ce roman? Mes mots sont ternes, plats. À défaut de mots justes, ce billet se déploiera à coups de citations. Cristina Hermeziu, dans l’avant-propos, exprime majestueusement bien de quoi il en retourne, sans trop en dévoiler.

Elle est cruelle, abrupte, intraitable. Tatiana Tîbuleac n’a pas de pitié. Elle malmène ses personnages, les roules dans la farine, les manipule, elle nous manipule, nous, lecteurs de chair et de sang, prêts à recevoir chez nous, en intimité, ce taré d’Aleksy et son incroyable histoire d’amour-haine pour une mère aux yeux verts.
Un roman poignant aux phrases cassantes, qui brillent et qui coupent comme des tranchants en diamant.
Si la littérature est légitime c’est précisément parce qu’elle sait tailler une forme de beauté – et une beauté de la forme –, à retrouver nulle part ailleurs.
Qu’est-ce qu’elle nourrit en nous, la littérature, pourquoi on lit, toujours assoiffés, pourquoi on écrit, inassouvis à jamais, quand les mythes ont déjà tout dit, quand les anciens ou les modernes ont déjà tout écrit? […] La littérature est l’art du comment, écrire repose sur la beauté des questions en train d’être appréhendées et non pas sur la sagesse des réponses.
L’originalité de Tatiana Tîbuleac repose toute sur l’intensité avec laquelle l’écrivaine taille une émotion dans la chair des mots. Le trouble s’installe, haletant, après seulement quelques lignes, jetées sur la page d’un geste précis, maîtrisé: puis circulez, cœurs sensibles s’abstenir, s’apitoyer sur son sort ne fait pas partie des options de ce récit, de cette écriture.
Si tu as envie de te lancer, c’est par cette phrase que L’été où maman a eu les yeux verts t’accueillera.
Ce matin-là, alors que je la haïssais plus que jamais, maman venait d’avoir trente-neuf ans. Elle était petite et grosse, bête et laide. C’était la maman la plus inutile de toutes celles qui ont jamais existé.
Ce roman est un volcan en ébullition. Ou un diamant brut. C’est selon. La dernière page tournée, j’ai commandé Le jardin de verre. C’est tout dire.
L’été où maman a eu les yeux verts, Tatiana Tibuleac, trad. Philippe Loubière, Éditions des Syrtes, 2018, 170 p.
© unsplash | Corina Rainer
C’est fou comme parfois les romans nous ôtent les mots de la bouche.
La 1re phrase m’a cueillie, il faut que je me le procure.
Là, je n’ai pas pu en parler. Les mots me fuyaient!
Parce qu’en plus du style de l’auteure, il y a l’histoire. Cette histoire qui part dans une direction et qui finit par faire un changer carrément de bord. Ça coupe le souffle et c’est beauuuuuu!
Bon, tu n’as peut-être pas trouvé les mots mais tu as trouvé les bonnes citations ! L’important c’est de donner l’envie de le lire au plus grand nombre !
Au plus grand nombre, oui! Il y de petits diamants bruts cachés qu’il faut vite mettre sous les projecteurs.
Mmmmh. La première phrase ne m’emballe pas du tout. Mais ta réaction par rapport à ce livre si, par contre. Je suis vraiment intriguée qu’il t’ai fait tellement d’effet que tu en aies laissé tes mots à d’autres pour nous en parler ! Je vais essayer de le trouver en librairie pour pouvoir le feuilleter et en lire plus que la première phrase 🙂
Merci pour cette découverte !
La première phrase donne le ton. Mais ce qui suit étreint le coeur (en bien)! C’est une histoire qui fait un bien fou à lire. Si tu as la chance de découvrir cette auteure, n’hésite pas stp! Pour ma part, son dernier roman s’en vient!
Tu m’as convaincue, je vais enquêter ! :)))
Bonne enquête! J’espère que tu pencheras du bon bord!
Le jardin de verre m’avait vraiment emballée, quelle plume! Je compte bien découvrir celui-ci.
On fera le chemin inverse! À moi, maintenant, Le jardin de verre!
Je viens d’acheter Le jardin de verre. J’attends beaucoup de cette auteure.
Ah, Véronique! Je suis ravie de te retrouver.
J’ai aussi commandé Le jardin de verre. Pas question que je laisse filer cette auteure!
Rassure-toi, on comprend très bien à quel point ce roman t’a bousculée, et qu’il est indispensable de le lire ! J’ai beaucoup aimé Le jardin de verre aussi, mais je l’ai trouvé un peu en-dessous de celui-là.
Même si Le jardin de verre est un chouia en deçà, ça sera déjà exceptionnel!
Bizarrement, comme LadyDoubleH, la première phrase m’a refroidi mais bon tu sais qu’avec Karen ça passe pas, et ce genre non plus mais en même temps, je me souviens de ton enthousiasme. Du coup, je vais plutôt l’emprunter et voir si ça passe ou ça casse !
Ça pourrait passer, je pense. Mais avec toi, j’ai souvent un doute!
Oh la la, ça donne envie d’en savoir plus. Cette écriture a tout pour me plaire, je suis déjà touchée par la première phrase. Et cette couverture… il est noté, merci !!
Celui-là, je te le dis, il a tout pour te faire chavirer. L’écriture t’emportera et… l’histoire ne peut que te renverser. Tsé, relation ado-maman…
Il est commandé !! Merci déjà…
Tu me remercieras après l’avoir lu?
C’est stressant en titi, cette attente du verdict!
Tu n’as plus aucune raison d’hésiter. C’est à lire, du début à la toute fin!
Je me laisse tenter sans hésitation.
Ça me fait plaisir de te retrouver ici. Tu fais bien de te laisser tenter! Celui-là, il est trop méconnu et c’est un grand dommage, tant pour l’histoire que pour la façon dont elle est enrobée.
C’est une belle façon de le mettre en avant aussi !
Tu as bien raison. Je n’aurais pas pu faire mieux!