Search

Mon étincelle · Ali Zamir

Étincelle est assise, bien attachée, à bord d’un avion qui relie deux îles de l’océan Indien. Ça brasse fort. Les zones de turbulences n’en finissent plus. Le vol est tumultueux. Pour chasser l’angoisse, elle se souvient des histoires que lui racontait sa mère, dont celle qui a menée à sa naissance.  

De toute façon, dans la vie, il faut s’accrocher à quelque chose pour réussir. Accrochez-vous donc et suivez l’histoire que m’a racontée maman. Bien que je n’avais pas entendue la formule populaire «il était une fois», cette histoire résonnait dans ma tête comme un conte de fée: c’est une histoire de deux étudiants qui commence à Madagascar dans la ville de Mahajanga. La ville aux baobabs. C’est l’histoire d’une adolescente de dix-huit ans, timide, réservée, prénommée Douceur, et d’un jeune homme courageux de dix-neuf ans, Douleur. Douleur et Douceur s’aimaient éperdument.

De fil en aiguille, Étincelle raconte, une histoire en amenant une autre. Il y est question d’expatriés qui reviennent faire le paon, de mariage arrangé, de mains baladeuses, de déodorants et de produits de blanchiment, de battements du cœur, de yeux pétillants et d’hésitation. L’amour subit des soubresauts, l’amitié aussi. La famille, elle, maintient son emprise. Telle Shéhérazade dans Les Mille et une nuits, Étincelle titille son lecteur et patiente, voire s’impatiente avec lui. En attendant l’atterrissage… ou le crash.

Ali Zamir est un conteur ensorcelant. Son roman échevelé m’a tenue en haleine. J’étais pendue aux lèvres d’Étincelle, impatiente de connaître l’histoire de Douceur et Douleur, ses parents, celles d’Efferalgan, de Dafalgan, d’Espoir, de Vitamine, sans oublier celle de Calcium. Ces personnages aux noms improbables m’ont tantôt émue, tantôt fait rire. Étincelle brode son histoire en cousant ensemble des souvenirs épars, enchaîne les péripéties et les digressions, créant un patchwork d’instants marquants. Si la construction m’a déstabilisé au début, je me suis prise au jeu. La luminosité déborde de ces récits enchâssés. L’humour n’est jamais loin, même s’il n’y a pas grands chose de drôle entre ces pages.

L’inventivité de la langue m’a d’abord prise au dépourvu. Le style d’Ali Zamir est très imagé, fleuri. Le roman est riche en mots rares, mais j’ai décidé de me laisser porter par la musicalité du texte plutôt que de chercher la signification des mots sur lesquels je butais. Au final, ce n’était pas plus mal. Ali Zamir restitue avec une remarquable justesse l’ambiance des Comores, les moeurs et coutumes d’un monde insulaire. Un roman magnétique et enchanteur, qui se dévore d’une traite. Une véritable pépite dans un paysage littéraire trop sans surprise.

Mon étincelle, Ali Zamir, Le Tripode, 2017, 280 p.

Rating: 4 out of 5.

© unsplash | Nikola Ancevski

20 comments

  1. Oh ouiiii, il est pour toi. Tu vas te régaler, tant pour la diversité des personnages que pour le ton poétique (oui, oui, j'ai aimé!) et l'enchevêtrement d'histoires.Avais-tu lu \ »Anguille sous roche\ »? Tu connais Ali Zamir? Moi, c'est une première.

  2. Si tu as aimé ce côté poétique, je vais adorer! Non je n'ai pas lu son précédent. C'est la première fois que j'entends parler de cet auteur! Merci de l'avoir mis en lumière.

  3. je vois que tu n'as pas fait le géo trouve-tout du dictionnaire 🙂 vendredi, je récupère Anguille sous roche :). j'espère qu'il sera aussi bien que Mon étincelles

  4. (Encore moi 🙂 )Je ne suis pas sure que je vais tenter l'expérience avec son premier roman. Les critiques sur Babelio ne sont pas franchement enthousiasmantes… je préfère découvrir l'auteur avec Mon étincelle!

  5. C'est vrai? Moi, je n'entends que du bien. C'est vrai que je n'ai rien lu sur Babelio.Apparemment, le style est très différent de \ »Mon Étincelle\ ». Je ne suis pas fâchée d'avoir commencé par ce dernier. Et je te conseille de faire de même!

  6. De fait, je me suis abstenue. Mon dictionnaire est trop poussiéreux et je n'avais pas envie de déranger la poussière. J'espère aussi que \ »Anguille sous roche\ » soit aussi fort que \ »Mon Étincelle\ ». En tout cas, si on se fie au pitch, ça promet fort!

  7. J'avais entendu tellement de bien de son premier roman. Je l'ai acheté des sa sortie . Malheureusement après plusieurs tentatives je n'ai pas réussi à le finir. Trop \ »baroque\ »,\ »original\ » dans sa construction ? Si tu veux que je t'expedie mon exemplaire envoie moi un message sur mon mail. Ce sera avec plaisir.Essai de lecture de Mon étincelle en librairie =échec �� Ali Zamir n'est vraiment pas pour moi.

  8. Merci pour l'offre. Je t'aurais bien dit oui, mais j'attends un service de presse de la version poche.Je comprends qu'Ali Zamir ne soit pas un auteur facile et que ses romans ne soient pas pour tout le monde. Moi, ça a très bien fonctionné. Reste à voir comment ça se passera avec \ »Anguille sou roche\ »!

  9. Anguille, lu d'une traite. Grand souvenir de lecture. D'autant plus quand on sait l'histoire éditoriale et humaine de l'auteur. C'est tellement excellent.

  10. Tu me connais et malgré ton coup de cœur très enthousiaste, en lisant l'avis des autres internautes, et l'aspect poétique – non il n'est pas pour moi ! Je suis fière de le dire car ma pàl a besoin d'un régime !

  11. Non, pas pour toi, celui-là! Je suis moi-même étonnée qu'il m'ait tant plu. J'ai vraiment aimé! Au point d'être impatiente de lire \ »Anguille sous roche\ »!

Comments are closed.

Close
Close
%d bloggers like this: