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Olive Kitteridge · Elizabeth Strout

Voir si je pensais que ça pouvait être aussi bon, ce roman-là. Il prenait la poussière depuis un bout. C’est la femme face à la mer, sur la couverture, qui m’a fait dire: me semble que ça serait un bon temps pour te lire, toi. Me v’la assise sur le balcon, livre en main. Le temps s’est arrêté. Ni l’herbe m’implorant de la tondre ni la vessie pleine de Marley n’ont réussi à me déconcentrer. Je lisais.

Ça se passe à Crosby, une petite ville côtière – fictive – du Maine. À jeter un œil rapide, il ne se passe pas grand-chose dans cette ville. Il suffit pourtant d’ouvrir la porte de la pharmacie ou de prendre un café au Dunkin Donuts pour s’apercevoir que ça fourmille de vies.

C’est dans cette ville qu’Olive est née et a grandi. C’est là qu’elle a épousé Henry et qu’ensemble, ils ont eu un fils. C’est aussi là qu’elle a enseigné les mathématiques pendant 30 ans. Et c’est là qu’elle vieillit.

C’est un sacré personnage, Olive. Vive d’esprit, pleine de failles et de contradictions. Irascible, psychorigide, intransigeante. Bref, pas commode pour deux cennes. Mais ce qu’elle peut devenir attachante. C’est quand même ratoureux d’arriver à rendre aussi sympathique un personnage aussi détestable.

Le roman déballe treize histoires, treize tranches de vie, chacune présentant un personnage. On se retrouve dans l’ordinaire de la vie, avec ce que ça implique de doutes, de bonheur, de déception et de frémissement. Olive se trouve tantôt au coeur du roman, tantôt à la périphérie. Elle mange un beigne, se retrouve dans les toilettes d’un hôpital, est étendue sur le lit de son fils après son mariage, s’assoit dans la voiture d’un ancien élève suicidaire… Elle passe ici en coup de vent et tient les rênes là. En trente ans, il s’en passe des choses…

Sous la plume d’Elizabeth Strout, les existences les plus beiges, les décors en demi-teinte deviennent papillotants. La langue est joueuse, savoureuse. L’intrigue est ponctuée de virages étonnants et de chutes inattendues. Le comique vient souvent s’insérer dans le tragique. C’est pétillant d’esprit.

Deux adultes dans la force de l’âge. Avaient-ils été conscients du bonheur paisible que ces moments recelaient? Sans doute que non. En général, les gens n’ont jamais assez conscience de vivre leur vie.

Ça valait la peine d’avoir les marques de chaise imprimées sous mes cuisses et d’être déshydratée – j’ai lu au soleil! Le lendemain, j’ai finalement tondu le gazon. J’ai-tu besoin de te dire que l’arrivée prochaine de Olive, enfin me met dans tous mes états?

Olive Kitteridge, Elizabeth Strout, trad. Pierre Brévignon, Livre de poche, 2012, 408 p.

Rating: 5 out of 5.

© unsplash | Ihor Malytskyi

28 comments

  1. Quel enthousiasme ! ça donne envie de le lire !
    Pour ma part, lors d’une de mes dernières lectures, j’ai justement tondu la pelouse au milieu de ma lecture pour faire durer le plaisir du livre plus longtemps !

    1. C’est pratique d’avoir une tâche extérieure à faire pour faire durer le plaisir! Vive le jardinage!
      Ah, cette Olive et son monde… Je me demande, par contre, si elle te plairait. J’ai comme un p’tit doute!

    1. Quels mots sages! C’est tout de même fascinant de se mettre face à sa PAL et de pressentir quels sont les titres qui nous feront vibrer. Parfois, on ne soupçonne aucunement qu’un titre nous fera à ce point de l’effet. J’avais même pensé à me départir d’Olive. Quelle erreur ça aurait été!

  2. Je conseille ce roman à bcp de monde. L adaptation en mini série est très bien également. Frances Dormand interprète ce personnage avec bcp de justesse. J ai gde hâte de lire la suite.

    1. C’est de l’ordre, pour moi, des rencontres marquantes, voire mémorables. C’est te dire!
      P. S. (Tes billets me manquent en mautadit!)

      1. Et pourtant il va falloir que tu patientes encore, je ne suis pas encore prête à écrire… Toujours dans les travaux, du boulot par dessus la tête, et je lis très peu. Pour te dire, un petit livre de 250 pages me tient environ dix jours ! Te rends-tu compte ?

    2. Bon, ça me rassure. Mine de rien, tout va bien. Tu t’installes, tu te sors la tête hors de l’eau et tu nous reviens avec plein de tentations!
      Je sais être patiente! Prends tout le temps qu’il te faut. Bises

  3. J’avais vu la série il y a déjà un moment, et j’avais beaucoup aimé – je crois que c’est à cause de ça que je n’ai pas eu envie de lire le livre jusqu’à présent !

    1. J’imagine bien que de voir la série gâche un brin le plaisir de découvrir le livre après coup. Mais parfois, je pense que non. D’autant plus si on a apprécié l’adaptation. De retrouver les personnages, avec des mots plutôt que des images, avec toutes les subtilités et des détails en plus (on ne peut pas tout mettre dans une adaptation), ajoute à l’appréciation d’ensemble. Et puis, dans ce cas-ci, il y a la suite: Olive, enfin! Le plaisir se poursuivra!
      Pour ma part, je compte regarder la série une fois que j’aurai lu le second opus.

  4. Ah zut ! On avait parlé d’une lecture commune mais j’ai oublié de te relancer. En tout cas, je me réjouis de le lire, ton enthousiasme et contagieux.

    1. Zut, oui. J’ai pris de l’avance! J’avais précisément besoin de ce genre de roman à ce moment-là. Il m’a sauvé d’une panne de lecture, où tout me tombait des mains.
      J’espère que tu le liras bientôt. Tu devrais l’apprécier autant que moi. Du moins, je l’espère. C’est totalement savoureux!

    1. Ahhhh! Je suis ravie. C’est le genre de romans que j’ai envie d’acheter et d’offrir à toutes lectrices de bon goût et avec du vécu (pour ne pas dire un peu vieilles!).

        1. Oh oui, vive le vécu!
          J’espère que tu es encore en bonne compagnie.
          Pour ma part, je file à l’aéroport récupéré Olive, enfin et… Electra!

    1. N’est-ce pas une rencontre exceptionnelle? Et tous ces personnages autour…
      J’ai adoré. Je reçois la suite ce week-end. Je me fais une grande joie d’avance.

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