J’ai lu Le repaire des solitudes dès sa parution, en 2015. Ce recueil de nouvelles est passé trop inaperçu à mon goût. Près de dix ans plus tard, Danny Émond revient. Cette fois avec un roman. J’te dis pas à quel point j’étais pressée de le lire!

Paulo est mort. Retrouvé pendu dans son garage. S’ensuit, pour le fils, le grand ménage d’une vie. À travers les objets trouvés – un manteau de cuir, un collier de chien, une valise cabossée, une montre arrêtée, une pharmacie remplie de pilules, une urne… – les souvenirs remontent à la surface.
Paulo, c’est tout un personnage. Il a magouillé des affaires croches, pouvait être impitoyable, lever le coude, laisser son poing revoler. Il avait aussi un grand coeur et avait un amour infini pour les animaux. C’était un patenteux passionné, pas trop parlant et pas toujours parlabe. Il était entouré d’une gang de tout croche attachant, le genre de personnes constamment repoussées par la société.
Paulo porte sur ses épaules l’entièreté du roman. Un personnage inoubliable émerge, portant le poids de la solitude et des défis de la maladie mentale. Son fils raconte tout avec une émouvante froideur.
L’univers de Danny Émond est fait de désenchantement et de misère existentielle. Comme dans Le repaire des solitudes, l’incommunicabilité et la solitude fusent de partout. Les personnages sont emmurés en eux-mêmes. La construction du roman est astucieuse: chaque court chapitre porte sur un objet. Cet inventaire permet de tisser la toile d’une vie. Avec une grande économie de mots, Danny Émond sait rendre palpables la léthargie émotionnelle et la fugacité de la vie. Les choix de vie, bons et mauvais, s’accumulent au fil du temps pour créer une vie. On ne lit pas ce genre de roman lorsqu’on est au fond du tunnel ou au bord du gouffre. On le lit pour découvrir un homme complexe, singulier, unique.
Je souhaite fort de ne pas avoir à patienter dix ans pour lire de nouveaux mots de Danny Émond. En attendant, la relecture pourra faire l’affaire, heureusement.
Il y a des gens comme ça qui vous rappellent qu’on peut mourir plusieurs fois dans une vie.
Quand les gens ne s’éloignaient pas d’eux-mêmes, Paulo prenait ses distances. Sa solitude aimait s’entourer, s’étourdir dans une agitation momentanée, mais tôt ou tard elle reprenait ses droits.
Fermer les yeux ne suffit pas, Danny Émond, Hashtag, 2024, 120 p.
© unsplash | Roseanna Smith
Très tentée même si forcément il va me bousculer, depuis quelques temps moi qui avait si bien apprivoisé la solitude, je galère à cohabiter avec elle parfois… la méno peut-être en cause.
Mais je note…
La ménopause bouleverse bien des choses, je confirme. Certaines bases solides sur lesquelles nous naviguions se mettent soudain à tanguer. C’est pour le moins déboussolant…
Désenchantement et misère existentielle, c’est tout ce que j’aime ! (dans les romans bien sûr^^)
Pareillement! Dis-moi, tu as un titre à me conseiller, qui y va à fond de ce côté?
Je note et ce titre et le recueil de nouvelles ! Et ce titre est très beau, très suggestif…
C’était parfait, vraiment parfait. C’est vrai que le titre est très suggestif.
très bonne nouvelle ! toi et tes abandons…dix ans… je pense aussi à Donna Tartt, ça fait dix ans cette année .. J’espère que tu garderas ce livre pour que je puisse te l’emprunter bientôt !
Oui, moi et mes abandons! D’excellentes lectures, entrecoupées d’ennui et d’abandons.
Je garde ce roman de côté pour toi!
On en parle souvent, de Donna Tartt, impatientes de l’arrivée d’un nouveau titre. Combien de temps, encore, devrons-nous patienter?!